J'avais bien repéré ce bâtiment industriel ; il semblait encore en activité (lumières allumées...) mais je n'arrivais jamais les bons jours.
2 etages*, en briques rouges comme il est de tradition par ici.
De fil en aiguille (!), j'avais appris qu'il s'agissait d'une filature.
A noter que la vile de Carrollton lui a rendu hommage en lui dédiant la rue adjacente...
Jusqu'au jour où Cessany m'annonçait la parution d'un article, dans le Times Georgian, annonçant sa disparition. Je me suis donc empressé de lui rendre visite et après quelques essais infructueux, j'ai pu franchir la porte d'entrée.
C'est Gary Treadwill, en plein travail de démontage, qui m'accueille au premier étage de l'usine. Il est le dernier propriétaire en partenariat avec son frère Keith : ils ont reçu l'usine en héritage. A sa connaissance, il restait 2 filatures de ce type aux USA. L'autre de plus grande dimension renvoyait souvent des commandes urgentes à leur usine dont la taille permettait une adaptation rapide.
Un peu d'histoire
Carrollton était située autrefois en plein milieu des champs de coton. Il en subsiste encore quelques uns. Le coton était reçu dans un dépôt à coté de l'usine. Celui-ci a disparu pour laisser la place à un parking. Le coton était ensuite expédié par train vers les filatures. Gary n'a connu que la livraison du fil par camion...
Le coton avait une telle importance dans l'économie locale qu'il y avait, dans les années 60, 4 usines du même genre à Carrollton.
Le sous-sol abritait un autre atelier :
Machines FOSTER 102 datant de la fin des années 1940.
Au total, la filature possédait 13 lignes faisant tourner 450 machines en même temps . Un employé devait faire fonctionner 4 lignes simultanément.
Vue d'une ligne "moderne"
L'usine fonctionnait 5 jours par semaine, 24 heures sur 24 par roulements de 8 heures. Au maximum de sa puissance (années 1960-70), 87 personnes étaient employées.
Beaucoup d'habitants ont commencé leur vie active ici à 16 ans. Après 2 ans, ils étaient souvent embauchés par Southwire, usine de câbles électriques.Témoin Curtis Spiwey l'homme de Quilts, collection Florrye Jeannette Chatham Spivey qui a commencé de travailler là au tarif de $1,60 l'heure.
Ancienne ligne en cours de démontage. Il y a environ 35 ans, on a remplacé les supports en bois par des supports métalliques.
Pour faire tourner plus vite des machines plus modernes , on a remplacé les poulies par des poulies de taille supérieure. Ça n'allait pas toujours tout seul. L'extracteur apportait l'aide nécessaire :
L'usine fonctionnait entièrement à l'électricité depuis 1924. Chaque ligne était mûe par un moteur de ce type fonctionnant en triphasé (440 Volts).
En fait, le mot filature ne convient pas parfaitement car l'usine ne produisait pas de fil. Celui-ci était acheté en vrac. Ici, il s'agissait de tresser les fils pour en faire des poignées, des sacs (à jambon par exemple), des lacets voire des tee-shirts...
Au fil des années, la production s'est diversifiée et outre le coton, il a été tressé du nylon, de la rayonne et du polyester.
Cela n'a toutefois pas suffi car la concurrence venue d'Asie a rendu ces usines obsolètes. Fin juin 2010, Gary prévoit que tout l'appareil de production aura été démonté. En attendant, il joue de la cle à molette et... du chariot élévateur :
Le matériel sera recyclé : une bonne dizaine de containers de ce type sera nécessaire à son évacuation...
L'avenir
Carrolton ne perd pas entièrement sa tradition puisqu'une usine flambant neuve est installée : ce sont des membres de la famille d'anciens propriétaires de la filature qui en sont les responsables...
Un musée du quilt va ouvrir ses portes à proximité de la filature : les deux frères lui ont fait don de 2 machines.
Le bâtiment ? Rien n'est envisagée à ce jour...Mais ne craignons pas trop pour son avenir : avant de devenir filature, il avait servi d'hôpital vétérinaire et d'usine pour Coca-Cola...
* Petit détail linguistique amusant : les anglophones ne nomment pas les étages comme nous. La notion de rez-de-chaussée n'existe pas. Donc ce que nous appelons le premier étage est le deuxième pour eux.
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